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Toursnman 2018 format IM par Philippe

Cette fois : pas de podium, pas de classement, pas de chrono, …, mais une victoire contre … moi-même, cette partie de moi qui avait réussi à convaincre l'ensemble de mon être à jeter l'éponge, à       abandonner. Et j'en avais trouvé de bonnes raisons puisque je n'arrivais pas à courir et que je déteste marcher. Mais heureusement, quoique je ne sais pas s'il est raisonnable de dire ça quand je vois mon état aujourd'hui, mais l'autre être qui est en moi et qui est bien moi sage (vous savez celui qui boit des bières avec excès, …) a repris le dessus et a dit : « Non, on abandonne pas. »

Ce qui est vraiment surprenant dans ce type d'aventure c'est qu'à chaque fois j'ai l'impression que je ne suis pas seul et que deux personnes tentent de prendre le dessus l'une sur l'autre. L'une est sage, et raisonnée et à certains moments ne comprend pas pourquoi je suis sur la course, son but devenant alors de tout mettre en œuvre pour que tu abandonnes et l'autre, ben … elle s'en fout de tout ça, elle veut aller vite, vise le classement, ne pense qu'à doubler et peut importe si les jambes ou le reste disent non … c'est la partie « folle » de mon être, celle qui prend la décision un vendredi soir à l'apéro de s'inscrire sur l'Ironman de Tours. Et bien c'est encore cette partie de moi qui a gagné hier.

Et pourtant au 8ème de CAP la messe était dite. J'avais versé ma petite larme mais c'était décidé, je regagnais l'arrivée en marchant et je rendais ma puce. J'abandonnais. Mais rien qu'à l'écrire ce mot, ça me fait mal ! Et puis je ne sais pas comment, ni pourquoi, mais j'ai essayé de marcher plus vite. Et puis de courir à nouveau. Et l'idée de terminer a germé. Fini le classement et le temps mais juste  terminer.

Et je crois que de voir David M. allongé dans le fossé à attendre les secours a été une source de motivation supplémentaire. Ce n'était plus que pour moi que je terminais mais c'était aussi par respect des autres, en respect de ceux qui ne finiraient pas.

Alors j'ai couru comme je pouvais mais j'ai couru jusqu'à la ligne d'arrivée en terminant ce putain de marathon en 5 heures et en pleurant comme un bébé en voyant Muriel qui m'attendait en back stage.  Ca y est, la partie « on débranche le cerveau » avait fait le job et laissait à l'autre gérer l'après-course.

Mais tout avait commencé bien plus tôt, avant même le départ natation. A Lacanau sûrement, quand j'ai goûté au podium. Quand j'ai réalisé qu'il y avait un podium pour les V3et plus je me suis dit pourquoi pas moi. Et je l'ai dit haut et fort. Alors quand j'ai vu qu'il y avait du courant sur la partie natation j'ai décidé de mettre un deuxième moteur et de battre les jambes. Pour rappel à Vichy, lors de mon premier Ironman, je m'interdisais de battre les jambes pour les préserver.

Bref, un première boucle de natation qui n'en fini pas et un premier signe inquiétant lors de la sortie à l'australienne où je sens une crampe venir lorsque les bénévoles m'aident à sortir de l'eau.

Deuxième boucle qui n'en fini pas. J'ai l'impression de dériver, de me battre contre le courant. Je me rapproche de la rive comme le font certains en pensant qu'il y aurait moins de courant mais ça m'éloigne des bouées alors … je retourne vers les bouées …. bref je nage comme Michel Hervé (je me permets car je suis sûr que ça le ferait sourire).

Et alors que j'approche de la dernière bouée, celle après laquelle tu vas enfin avoir le courant favorable, je suis foudroyé par une crampe. Et quand je dis foudroyé, …., je n'avais jamais vécu ça.

Le problème c'est que n'avais pas encore passé cette p…. de bouée et quand arrêtant de nager ben je reculais. Alors j'ai attendu que ça passe et je suis reparti sans battre de jambes. Mais au passage de la bouée je me suis fais nager dessus et bien sûr j'ai fini sous la bouée alors j'ai rebattu des jambes et là … c'est comme si je me faisais attaquer par un crocodile. Ce n'était plus un mollet mais la jambe entière, les deux jambes, …, alors je tournais dans l'eau comme et ça devait donner l'impression que je me débattais. Si bien qu'un zodiac avec un arbitre à bord s'est approché. Et là je me suis dit qu'il allait falloir que je souffre en silence car sinon je risquais la mise hors course. Alors j'ai serré les dents, fermé les yeux et me suis mis sur le dos les bras en croix sur le ventre à attendre que ça passe. Et je dérivais … mais dans le bon sens. J'ai regagné la plate-forme du départ sans battre des pieds en sentant bien que je nageais un peu comme Luc (un peu c'est déjà énorme!) mais j'ai été une nouvelle fois foudroyé dès la sortie de l'eau. J'étais là allongé sur le ponton avec un bénévole sur chaque jambe à essayer de me faire passer ces crampes.

Autant vous dire que lorsque j'ai regagné la tente pour me changer j'avais la mine des beaux jours, vous savez, …., bref !  

 

Et en regagnant mon vélo en courant sur une jambe, j'ai compris que la journée allait être compliquée.

Mais c'était parti pour 180 kms et sur un profil plat. Le départ se faisant sous une pluie battante tout le monde était prudent. Le but étant de rester sur sa monture. Et ça me convenait, je sentais bien des raideurs dans les jambes mais ça ne m'empêchait pas de rouler.

J'ai rapidement compris qu'il allait falloir opter pour une fréquence de pédalage élevée car je ne pouvais pas écraser les pédales ni me relancer en danseuse. Mais ça le faisait et je doublais. Et je doublais. Et lorsqu'on m'a dit que j'étais 131ème au 70ème km ça m'a mis du baume au coeur. Alors j'ai maintenu mon effort et j'ai continué à doubler. Et comme ça jusqu'à la fin du vélo. Je m'alimentais bien et j'étais à 35 km/h de moyenne. Je ne savais pas comment aller se passer la CAP mais je faisais le job à vélo. Et j'avais du plaisir. Jusque là !!!

J'arrive au parc et dès que je commence à courir à coté de mon vélo je sais que ça va pas le faire. Je boîte !

Alors je vais chercher mon sac de transition mais je n'ai plus le moral. Un marathon en boitant … mais c'est impossible !!!

Et si ça allait mieux après quelques kilomètres ? Allez c'est parti. Mais pas sur un rythme de 5'30'' au km. Je fais comme je peux mais je dois donner l'impression de courir sur des braises. Et il fait chaud ! Putain qu'il fait chaud ! « Mais non ça va le faire, ça va passer, et puis la chaleur tu aimes ça ! C'est la autres qui ne la supportent pas ! » Ça y est, c'est cette fameuse dualité qui se met en place !

Mais avant même le premier ravito, je marche. Ça fait trop mal ! Tout le monde me double. J'ai le moral dans les chaussettes. Ça va pas le faire ! Je viens de me taper des séances de kiné pour soigner une tendinite rotulienne qui est toujours là et là .. c'est l'horreur !

En quelques minutes, les espoirs de classement, de temps, …, s'envolent et font place à l'idée sage d'abandonner. Il reste près de 40 kilomètres à faire et je n'ai plus du tout le mental. C'est à pleurer.

Tout ça pour ça !!!

Alors je marche, je marche. Je boîte mais je marche. Et la décision est prise : j'abandonne. Ma décision est tellement irrévocable et pleine de sagesse que je suis soulagé. Il n'y a plus de dualité.

J'ai fait le maximum et ça ne sert à rien de continuer.

Et vous connaissez la suite.

Bon aujourd'hui je marche comme un vieillard (mais de 69,7 kgs :pas vu ça depuis l'âge de 30 ans !) et il me faudrait un déambulateur. Mais j'ai fini mon 4ème Ironman. Et je pense qu'il s'agissait de mon dernier. Sniff. Rien que de l'écrire ça me fait du mal !

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